Lors d’un premier voyage en Afrique subsaharienne, notre regard est souvent marqué par la multitude de femmes, panier sur la tête, parcourant des kilomètres pour vendre toutes sortes de produits, préparés avant l’aube. Ces femmes ne sont qu’une partie du tableau entrepreneurial féminin en Afrique. Mais n’est-ce pas sur le continent Africain qu’on trouve le plus de femmes entrepreneures au monde ? Aïda est l’une d’entre elles et nous avons envie de vous la présenter…
Certaines grandes villes d’Afrique sont comme une fourmilière… Ça grouille d’activités incessantes, d’initiatives qui peuvent nous paraître insignifiantes.
Et pourtant, il s’agit d’entrepreneuriat aux formes multiples : micro-entreprises informelles, initiatives individuelles, réseau de coopératives de plus en plus nombreuses… Les activités vont de la réparation d’objets à la couture ou au recyclage, en passant par les traiteurs de rue ou encore le transports selon des moyens aussi variés qu’inventifs…
Cet entrepreneuriat est une réalité que les femmes n’ont pas toujours choisie. Il s’agit plutôt d’une nécessité pour subvenir aux besoins de la famille. D’ailleurs, il comporte souvent des grands risques car il est parfois considéré comme illégal. Comme au Rwanda, où les femmes se retrouvent très souvent en prison pour plusieurs mois. En effet, le gouvernement interdit la vente « à la sauvette », qui permet pourtant à beaucoup de familles de survivre.
La vigueur entrepreneuriale de la femme africaine se traduit souvent au départ par une pulsion quotidienne de survie, transmise de génération en génération ! Beaucoup de femmes ont cet esprit d’entreprise dans les gènes. Leur créativité et leur ténacité feraient d’ailleurs pâlir bon nombre d’entrepreneur(e)s chez nous…
Même si cet entrepreneuriat de « survie » ne permet pas un développement durable de leur communauté, il permet néanmoins à chacune de développer des compétences essentielles, comme la débrouillardise, la résilience, la capacité d’adaptation, le courage et la détermination.
Dans un monde où l’économie a été pensée par et pour certains pays du Nord (selon leurs ressources et leurs modes de fonctionnement), l’Afrique tente de s’adapter, tout en conservant, fort heureusement, son essence, ses valeurs et ses fondements.
Chez Indah, nous sommes convaincues qu’il est essentiel de démarrer un projet en s’appuyant sur les talents de chacun et chacune. C’est en reconnaissant ceux-ci et en les encourageants que le véritablement développement est possible. C’est ainsi que la « Boutique Solidaire Indah » est née. Elle permet de soutenir des artisans et artisanes, des femmes entrepreneures à travers leurs jolies créations. Nous souhaitons encourager celles qui ont le projet d’entreprendre. Qu’il s’agisse d’entreprendre des études, une formation ou une activité rémunératrice, qui peut être aussi source de plaisir et surtout de fierté.
Au sein du groupe des femmes que nous soutenons aux côtés de notre partenaire local « Amizero » au Rwanda, la situation de beaucoup d’entre elles peut illustrer cette réflexion.
C’est le cas de Aïda Niwemfura. En 1994, Aïda avait à peine onze ans lorsqu’elle a perdu sa maman. Orpheline du génocide, elle s’est réfugiée chez la sœur de sa maman et a été scolarisée à Ruli, à 40 km de Kigali. Aïda a vécu une grossesse précoce qui l’a contrainte à arrêter sa scolarité et à fuir son village, par honte, alors qu’elle n’avait que seize ans. Elle s’est réfugiée dans le village de son père (emprisonné) à Kabuga, de l’autre côté de Kigali.
Plus tard, Aïda a rencontré Amza, qui est aujourd’hui le père de ses trois autres enfants, dont Issa et Ratifa (enfants parrainés depuis 2020 par Indah). Pour subvenir aux besoins de sa famille, Aïda a entrepris des petites activités génératrices de revenus. Elle puise de l’eau sur les chantiers de construction et elle vend également des petits poissons grillés. Elle a vu dans ce modeste commerce informel une opportunité de s’en sortir. En effet, dans son quartier, elle est la seule à proposer ces denrées à la vente. Sa marchandise s’écoule chaque jour, sans difficulté.
Mais le rêve d’Aïda est de confectionner et de vendre de jolies créations en tissus (pagnes et autres vêtements pour les femmes rwandaises). Aïda a cet esprit d’entreprendre, le courage d’une mère, ainsi que la passion nécessaire pour la couture.
C’est pour elle et pour toutes les autres femmes que nous avons donc mis en place un système de parrainage, pour lequel nous cherchons régulièrement des parrains et marraines. Comme d’autres femmes, nous soutenons Aïda dans sa démarche vers la dignité. Car c’est notamment en soutenant la dignité des femmes et des mères, bien au-delà de l’éducation des enfants, que nous pourrons permettre aux peuples d’être libres !
Aïda Niwemfura – Kigali (novembre 2020)